La commune de Challes, à l’épicentre de la vallée du Narais avec son bourg au pied du ruisseau du même nom possède un patrimoine naturel (certes pas spectaculaire) mais pourtant fondamental pour notre avenir, car, non renouvelable
à l’échelle humaine.
A la fois connu et méconnu
Il n’est pas rare de voir dans le bourg des groupes de randonneurs venus du Mans qui laissent leur voiture, place de l’Eglise ou place des Marronniers. De là, ils partent sur les nombreux chemins de sables et de bruyères de la vallée, où ils apercevront peut-être des cerfs, des chevreuils ou des sangliers venus s’abreuver dans le Narais, cours d’eau bien connu par les pêcheurs de truites. Mais, il est méconnu que la vallée du Narais est reconnue et classée, au niveau européen, comme un des espaces naturels les plus remarquables des Pays de Loire pour sa flore et sa faune.
C'est aussi un habitat prioritaire classé en Natura 2000.
Cette vallée est constituée de prairies humides marécageuses, de magnocariçaies, de berges et de plaques tourbeuses morcelées par le creusement de pièces d'eau et d'étangs, enclavées entre champs et pinèdes. Par exemple, la zone du Canada fût autrefois exploitée comme ancienne tourbière : elle présente un intérêt patrimonial très fort.
Comme exemples de faune et de flore , on peut citer la droséra rossolis à feuilles rondes (drosera rotundifolia), plante carnivore qui capture et digère les insectes avec ses feuilles garnies de poils gluants, l’aconit napel (aconitumnapellus), fleur qu’on trouve plutôt enmontagne, la pulmonaire des marais (gentiana pneumonanthe) qui en symbiose avec une fourmi, la Myrmica favorise l’éclosion d’un papillon, l’Azuré des mouillères, inscrit sur la liste des espèces menacées, car sa survie dépend de la gentiane et de la fourmi . Ce sont aussi d’autres plantes carnivores, une quinzaine de variétés d’orchidées, des invertébrés, des libellules, des amphibiens, etc.
La configuration géographique, géologique, hydraulique de la vallée peut expliquer pourquoi ces espèces rares ont survécu aujourd’hui. Le Narais, de sa source dans la forêt de Bercé à son arrivée dans l’Huisne à St Mars la Brière se trouve dans un vaste ensemble naturel peu morcelé (propriétés de Grammont, de Loudon, camp militaire d’Auvours), dénommé parfois le « Maine Roux » car recouvert de forêts de pins avec des landes humides ou à bruyères, installées sur les sables cénomans il y a environ 100 millions d’années. L’eau y est abondante, sous toutes ces formes (ruisseau, prairies humides, tourbières, étangs,marécages). Le sol peut être tantôt acide, alcalin, humide et aussi…sec.
Nous avons donc là un écosystème original, riche, rare qui explique la présence de ces espèces. La protection de celles-ci passe nécessairement par la protection de tout leur habitat, donc de tout l’écosystème.
Des services inestimables et mésestimés
En termes économiques, cet écosystème représente un capital naturel qui offre des services inestimables et mésestimés.
Cet écosystème est à la fois :
- conservatoire d’une flore qui témoigne des époques passées ; capital génétique pour la pharmacie, pour la pollinisation des plantes,
- station naturelle d’épuration, éponge anticrue, réservoir de stockage pour l’eau (ce n’est pas par hasard s’il y a un forage pour l’exploitation d’eau de table en bouteilles),
- puits de carbone pour la qualité de l’air ; énergie renouvelable et locale par le bois de chauffage,
- moyen de protection et de fertilisation du sol, de l’humus avec une agriculture de proximité, extensive, de qualité, «bio», labellisée.